Dans le cadre de la Semaine Européenne pour l’Emploi des Personnes Handicapées 2023 (SEEPH), du 20 au 25 novembre, l’IFPRA se mobilise et met à l’honneur différents acteurs du réseau autour de la question du handicap en milieu professionnel. Pour ce dernier rendez-vous SEEPH 2023, nous mettons à l’honneur, un jeune Flériens de 18 ans, Enzo Lecherbonnier, en apprentissage au Lycée Guéhenno et dans la librairie All Livres depuis Septembre.
Un article tiré du quotidien Ouest-France du 11 octobre dernier.
« J’adore lire des BD et des mangas. Et depuis quelque temps je me mets à Boris Vian », lâche Enzo Lecherbonnier, 18 ans. Il faut dire qu’il est dans un environnement propice. Des livres il y en a à profusion. Après un stage chaque mardi matin, pendant un an et demi, dans la librairie solidaire All Livres, Enzo Lecherbonnier a rejoint son équipe en apprentissage en septembre. L’année n’est pas terminée et la librairie d’insertion et d’économie solidaire All Livres a déjà récolté 180 tonnes de livres d’occasion via ses bornes. En plus, elle œuvre depuis 2011 en faveur de l’insertion et de l’emploi des personnes en situation de handicap. Les onze salariés sont reconnus comme travailleurs handicapés. C’est la première fois que la structure accueille un apprenti en CAP vente, reconnu comme travailleur handicapé.
Comme un poisson dans l’eau
Dans la librairie, le jeune homme se sent comme un poisson dans l’eau. « C’est un salarié modèle, il se sent comme chez lui et progresse beaucoup », se félicite Cédric Audibert, le gérant de la librairie. Collecte, tri, recherche de cotation, mise en rayon, Enzo Lecherbonnier découvre l’ensemble de la chaîne à l’exception de la caisse, pour l’instant. Après avoir changé plusieurs fois de collèges et de lycées, ayant été en famille d’accueil, il s’est orienté vers un CAP vente au lycée Guéhenno. « J’avais fait un stage de 3e à Bricomarché, j’avais beaucoup aimé le contact avec les clients et puis je faisais beaucoup de choses », se souvient-il.
On les prépare aux journées longues, au savoir-être
La semaine, il est accompagné par l’Institut thérapeutique éducatif et pédagogique (Itep) de Flers. Cette dernière encadre les jeunes atteints d’un handicap cognitif et plus particulièrement de troubles du comportement. Trois personnes de l’Itep sont eux aussi en apprentissage. « Il y a plus d’inclusion parce qu’il y a aussi une loi qui contraint les établissements à le faire. Nous, on les accompagne en amont et on les prépare aux journées longues, au savoir-être », glisse Omar Ayad, responsable de service à l’Itep.
Je suis là pour qu’il soit autonome
Avant de franchir le pas de l’apprentissage, tout s’est fait progressivement avec une demi-journée par semaine à All Livres. Cédric Audibert, le gérant de la librairie, a tout de suite été partant. « Je m’étais fixé comme objectif d’accueillir un apprenti d’Institut médico-éducatif (IME) ou d’Itep. Ici, chacun trouve sa place, développe un esprit d’équipe. Je suis là pour qu’il soit autonome et l’Itep pour assurer la sécurité », détaille-t-il. Un accompagnement et une voie vers l’insertion qui ont pu se faire dans les meilleures conditions grâce au partenariat entre l’Itep de Normandie Générations, le lycée Guéhenno et All Livres.
Un élève comme les autres
À la différence de certains apprentissages, Enzo Lecherbonnier a un rythme adapté, convenu avec le lycée Guéhenno et la libraire. Le lundi et le vendredi, il est en cours. Et le mardi, mercredi et jeudi à All Livres. « Enzo est vraiment un élève comme les autres. Lorsqu’il a des difficultés, il peut en parler : par exemple, il y a un cours où la prise de notes est trop rapide. On va adapter ça », décrit Thibault Perquis, directeur délégué à la formation professionnelle et technologique au lycée Guéhenno. Cédric Audibert est particulièrement impliqué et chaque jour, Enzo Lecherbonnier doit compléter une fiche avec des objectifs, un dictionnaire toujours à côté de lui. « Le premier jour, il devait noter tous les rayons de la librairie et se renseigner sur les mots comme “ethnologie”. C’est important le vocabulaire, c’est comme ça aussi qu’on se développe », explique le gérant. « Ça ne sert à rien de travailler que pour l’argent, il faut aimer son travail. C’est ce que je dis aux autres en classe », devise Enzo Lecherbonnier.
Propos recueillis par Maxime ARNOULT – Ouest-France | 11.10.2023